Neswletter 5: le Mali
8 novembre 2003, nous pénétrons enfin au Mali, et le changement déjà se fait
sentir sur la route : plus de goudron (même troué), seule une piste de terre
rouge qui laisse une épaisse traînée de fumée derrière nous nous sert de fil
d’Ariane en pleine brousse. La frontière malienne posera quelques soucis,
notre assurance ne leur plaisant visiblement pas, et les douaniers prétextant
qu’elle n’est pas valable au Mali (bien que ce soit marqué noir sur blanc sur
notre contrat AXA) veulent nous extirper… 10 000 frs CFA pour passer ! Mais à
force de persuasion et surtout d’une lettre de recommandation de l’ambassade
nous passerons sans encombre.
Nous arrivons à Kayes le soir même où nous nous mettons aussitôt en quête d’un
train pouvant transporter la voiture jusqu’à Bamako quand un policier en chef
nous immobilise la voiture pour la même histoire d’assurance ; à croire qu’ils
se sont donnés le mot pour arnaquer les touristes ! Nous userons de plus de
diplomatie ce soir là en appelant l’ambassade de France à Bamako ; le policier
apprenant cela nous rend bien vite nos papiers la queue basse : nous exultons
! C’est la première victoire que nous remportons face à ces policiers et
douaniers corrompus ; pour fêter cela nous nous offrons un petit resto dans
une échoppe d’apparence assez minable mais que nous animerons avec notre
guitare et quelques percussions improvisées par des maliens… Nous sommes
accueillis à Kayes par le père Koumtoubré, dont le sermon animé de sa messe
nous laissera un vif souvenir, tout comme l’assemblée de cette même messe qui
a gardé la disposition coloniale : les hommes à gauche, les femmes à droite…
et nous, qui n’avons rien vus, nous sommes bien sur mis du côté de ces dames !
Le marché de Kayes est superbe :
des boubous haut en couleurs, des étalages qui débordent d’épices, citrons,
piments, viande, et un florilège d’odeurs allant des plus douces aux plus
acres… mais point question de photo, les maliens ne les apprécient visiblement
pas !
Depuis que la société nationale de chemin de fer malienne a été rachetée par
les canadiens, il n’est plus possible de mettre la voiture sur le train pour
Bamako ; il nous faut donc reprendre la piste dont personne n’est ici en
mesure de nous dire l’état. Nous nous rendons donc compte par nous même
qu’elle n’est pas excellente, mais de grands travaux entrepris par la
communauté européenne ont pour objet de relier Kayes à Bamako par la route,
ainsi on trouve de grandes portions fraîchement goudronnées qui nous
permettront d’augmenter un peu notre moyenne (600 km en 2 jours !). La piste
se termine par plusieurs km de tôle ondulée, un cauchemar tant pour la voiture
qui semble prête à exploser que pour nous qui avons l’impression que nos dents
vont se déraciner ; mais si nos dents sont toujours là les freins eux ont
décidé de nous lâcher définitivement et tombent à nos pieds quand nous
enlevons la roue ! Sitôt arrêté une foule de curieux se presse autours de la
voiture, et pendant que Fab distribue généreusement des biscuits à toute
l’assemblée d’enfants (très disciplinés, chacun veille à ce que son voisin ait
bien été servi ! On est loin des goûters louveteaux…), un garagiste avec une
vis et un peu de fil de couture (véridique !) nous fait une réparation qui
nous permettra de tenir jusqu’à Bamako, et ce sans rien nous demander en
échange ! Rien à voir avec la mentalité mauritanienne…
On plonge à Bamako plutôt qu’on y arrive, et nous nous retrouvons vite dans
cette fièvre qui semble animer toutes les villes africaines ; nous posons avec
joie nos bagages pour quelque temps dans le centre de formation
professionnelle salésien Père Michel, dont le directeur Ferdinand Zigui nous
attend. Nous avons la mission d’installer notre pompe dans une ferme que les
frères possèdent au bord du fleuve Niger, à Moribabougou. Une petite étude sur
place nous permet de dimensionner les différents éléments de l’éolienne que
nous fabriquerons à la section construction métallique du centre, construction
qui compte tenu du rythme africain qui s’est imposé à nous nous prendra un peu
plus de temps que prévu… c’est la nonchalance ! Quelques données techniques
pour les ingénieurs qui nous liront : l’éolienne est de type savonius, qui
permet un amorçage par vent faible et assure une rotation quasi-constante.
Elle est reliée à la pompe dans le puit par un fer à béton guidé en rotation
par des paliers en bois et un grand tube PVC. Enfin les roulements permettant
à l’ensemble de tourner sont faits de billes en verre et de bois. Nous devons
aussi modifier quelques éléments sur la pompe : les clapets ne sont pas
parfaitement étanches, et une culasse est à refaire.
L’employé de la ferme, Drissa, nous aide bien dans notre tâche, et nous
donnera même de délicieuses mangues, et des bananes qu’on peut venir cueillir
directement sur l’arbre ! Et effectivement elles sont bien meilleures ainsi…
Nous avons eu quelque inquiétude jusqu’au dernier moment lors de
l’installation de la pompe : nous désespérions de voir enfin les clapets en
bois fonctionner (toujours ce problème d’étanchéité) ; et après avoir essayé
diverses solutions plus ou moins heureuses nous nous sommes tournés vers
l’achat dans le commerce de clapets parfaitement étanches. La pompe fonctionne
donc bien, reste le vent, facteur que nous ne maîtrisons pas… Photos
prochainement sur le site !
Nous profitons de notre halte à Bamako pour nouer des contacts plus profonds
avec les gens que nous rencontrons : déjà les pères salésiens avec qui nous
partageons quotidiennement les repas : père Ramon, un air sévère qui dissimule
mal un côté pince-sans-rire et une grande culture, nous aurons de grandes
discussions avec lui, le père Zigui, un togolais drôle, et deux frères :
Isidore et Bernard. Nous nous lions d’amitié avec un employé du cyber café
duquel nous vous envoyons nos nouvelles, Abou, qui est impressionné d’avoir
sous ses yeux trois jeunes venant de France en voiture ; ils nous fait
découvrir les « bons plans » de Bamako by night. Nous visitons aussi un peu
la ville, notamment son superbe musée retraçant l’histoire du Mali au travers
de statuettes africaines ou de tissus traditionnels.
A toutes ces rencontres s’ajoutent celle d’un ancien élève de notre école
travaillant dans les forages et assez sceptique quand à la viabilité à long
terme de notre projet, et celle d’un couple de retraités français, M. et Mme
Regnier-Vigouroux, qui ont consacré une bonne partie de leur vie à la
réalisation d’infrastructures dans deux villages proches de Bamako (écoles,
dispensaires, installation de pompes, distributions de médicaments,
vêtements…) ; leur travail est prodigieux, et nous sommes impressionnés par ce
couple qui ne se laisse pas démonter par la mauvaise utilisation qui est faite
de leurs réalisations : les panneaux solaires des pompes sont volés, la salle
des fêtes qu’ils ont construits se transforme en école coranique, les pompes à
main ne sont pas entretenues et tombent en désuétude… Plus prudents maintenant
grâce à leur bonne expérience, ils aident toujours de bon cœur ces villageois
malgré ces incidents dus à la mauvaise mentalité que leur a inculqué le régime
dictatorial précédant.
Un mot enfin sur le ramadan qui a pris fin le 25 novembre : déjà il faut
savoir que la consommation des ménages est supérieure pendant le mois de
ramadan, les gens engouffrant force plats la nuit en vue de la journée ; le
dernier jour du ramadan on voit des troupeaux de vaches envahir les routes, et
des gens égorger et découper à même le sol leur bovin familial. Ensuite c’est
l’effervescence, les maliens revêtent leurs plus beaux boubous, achètent des
habits neufs pour leurs enfants et font une bonne fête pendant deux jours ! Ce
ramadan sonne comme en écho aux préparatifs de Noël qui constituent en général
l’actualité de cette période en France, mais nous sommes à mille lieux de tout
cela ! Nous pensons fêter Noël au Burkina, et espérons trouver d’autres
personnes pour se joindre à nous… contacts sur place bienvenus ! En attendant
bons préparatifs à tous, et mettez bien vos petites laines !
Guénaël
8 novembre 2003, nous pénétrons enfin au Mali, et le changement déjà se fait
sentir sur la route : plus de goudron (même troué), seule une piste de terre
rouge qui laisse une épaisse traînée de fumée derrière nous nous sert de fil
d’Ariane en pleine brousse. La frontière malienne posera quelques soucis,
notre assurance ne leur plaisant visiblement pas, et les douaniers prétextant
qu’elle n’est pas valable au Mali (bien que ce soit marqué noir sur blanc sur
notre contrat AXA) veulent nous extirper… 10 000 frs CFA pour passer ! Mais à
force de persuasion et surtout d’une lettre de recommandation de l’ambassade
nous passerons sans encombre.
Nous arrivons à Kayes le soir même où nous nous mettons aussitôt en quête d’un
train pouvant transporter la voiture jusqu’à Bamako quand un policier en chef
nous immobilise la voiture pour la même histoire d’assurance ; à croire qu’ils
se sont donnés le mot pour arnaquer les touristes ! Nous userons de plus de
diplomatie ce soir là en appelant l’ambassade de France à Bamako ; le policier
apprenant cela nous rend bien vite nos papiers la queue basse : nous exultons
! C’est la première victoire que nous remportons face à ces policiers et
douaniers corrompus ; pour fêter cela nous nous offrons un petit resto dans
une échoppe d’apparence assez minable mais que nous animerons avec notre
guitare et quelques percussions improvisées par des maliens… Nous sommes
accueillis à Kayes par le père Koumtoubré, dont le sermon animé de sa messe
nous laissera un vif souvenir, tout comme l’assemblée de cette même messe qui
a gardé la disposition coloniale : les hommes à gauche, les femmes à droite…
et nous, qui n’avons rien vus, nous sommes bien sur mis du côté de ces dames !
Le marché de Kayes est superbe :
des boubous haut en couleurs, des étalages qui débordent d’épices, citrons,
piments, viande, et un florilège d’odeurs allant des plus douces aux plus
acres… mais point question de photo, les maliens ne les apprécient visiblement
pas !
Depuis que la société nationale de chemin de fer malienne a été rachetée par
les canadiens, il n’est plus possible de mettre la voiture sur le train pour
Bamako ; il nous faut donc reprendre la piste dont personne n’est ici en
mesure de nous dire l’état. Nous nous rendons donc compte par nous même
qu’elle n’est pas excellente, mais de grands travaux entrepris par la
communauté européenne ont pour objet de relier Kayes à Bamako par la route,
ainsi on trouve de grandes portions fraîchement goudronnées qui nous
permettront d’augmenter un peu notre moyenne (600 km en 2 jours !). La piste
se termine par plusieurs km de tôle ondulée, un cauchemar tant pour la voiture
qui semble prête à exploser que pour nous qui avons l’impression que nos dents
vont se déraciner ; mais si nos dents sont toujours là les freins eux ont
décidé de nous lâcher définitivement et tombent à nos pieds quand nous
enlevons la roue ! Sitôt arrêté une foule de curieux se presse autours de la
voiture, et pendant que Fab distribue généreusement des biscuits à toute
l’assemblée d’enfants (très disciplinés, chacun veille à ce que son voisin ait
bien été servi ! On est loin des goûters louveteaux…), un garagiste avec une
vis et un peu de fil de couture (véridique !) nous fait une réparation qui
nous permettra de tenir jusqu’à Bamako, et ce sans rien nous demander en
échange ! Rien à voir avec la mentalité mauritanienne…
On plonge à Bamako plutôt qu’on y arrive, et nous nous retrouvons vite dans
cette fièvre qui semble animer toutes les villes africaines ; nous posons avec
joie nos bagages pour quelque temps dans le centre de formation
professionnelle salésien Père Michel, dont le directeur Ferdinand Zigui nous
attend. Nous avons la mission d’installer notre pompe dans une ferme que les
frères possèdent au bord du fleuve Niger, à Moribabougou. Une petite étude sur
place nous permet de dimensionner les différents éléments de l’éolienne que
nous fabriquerons à la section construction métallique du centre, construction
qui compte tenu du rythme africain qui s’est imposé à nous nous prendra un peu
plus de temps que prévu… c’est la nonchalance ! Quelques données techniques
pour les ingénieurs qui nous liront : l’éolienne est de type savonius, qui
permet un amorçage par vent faible et assure une rotation quasi-constante.
Elle est reliée à la pompe dans le puit par un fer à béton guidé en rotation
par des paliers en bois et un grand tube PVC. Enfin les roulements permettant
à l’ensemble de tourner sont faits de billes en verre et de bois. Nous devons
aussi modifier quelques éléments sur la pompe : les clapets ne sont pas
parfaitement étanches, et une culasse est à refaire.
L’employé de la ferme, Drissa, nous aide bien dans notre tâche, et nous
donnera même de délicieuses mangues, et des bananes qu’on peut venir cueillir
directement sur l’arbre ! Et effectivement elles sont bien meilleures ainsi…
Nous avons eu quelque inquiétude jusqu’au dernier moment lors de
l’installation de la pompe : nous désespérions de voir enfin les clapets en
bois fonctionner (toujours ce problème d’étanchéité) ; et après avoir essayé
diverses solutions plus ou moins heureuses nous nous sommes tournés vers
l’achat dans le commerce de clapets parfaitement étanches. La pompe fonctionne
donc bien, reste le vent, facteur que nous ne maîtrisons pas… Photos
prochainement sur le site !
Nous profitons de notre halte à Bamako pour nouer des contacts plus profonds
avec les gens que nous rencontrons : déjà les pères salésiens avec qui nous
partageons quotidiennement les repas : père Ramon, un air sévère qui dissimule
mal un côté pince-sans-rire et une grande culture, nous aurons de grandes
discussions avec lui, le père Zigui, un togolais drôle, et deux frères :
Isidore et Bernard. Nous nous lions d’amitié avec un employé du cyber café
duquel nous vous envoyons nos nouvelles, Abou, qui est impressionné d’avoir
sous ses yeux trois jeunes venant de France en voiture ; ils nous fait
découvrir les « bons plans » de Bamako by night. Nous visitons aussi un peu
la ville, notamment son superbe musée retraçant l’histoire du Mali au travers
de statuettes africaines ou de tissus traditionnels.
A toutes ces rencontres s’ajoutent celle d’un ancien élève de notre école
travaillant dans les forages et assez sceptique quand à la viabilité à long
terme de notre projet, et celle d’un couple de retraités français, M. et Mme
Regnier-Vigouroux, qui ont consacré une bonne partie de leur vie à la
réalisation d’infrastructures dans deux villages proches de Bamako (écoles,
dispensaires, installation de pompes, distributions de médicaments,
vêtements…) ; leur travail est prodigieux, et nous sommes impressionnés par ce
couple qui ne se laisse pas démonter par la mauvaise utilisation qui est faite
de leurs réalisations : les panneaux solaires des pompes sont volés, la salle
des fêtes qu’ils ont construits se transforme en école coranique, les pompes à
main ne sont pas entretenues et tombent en désuétude… Plus prudents maintenant
grâce à leur bonne expérience, ils aident toujours de bon cœur ces villageois
malgré ces incidents dus à la mauvaise mentalité que leur a inculqué le régime
dictatorial précédant.
Un mot enfin sur le ramadan qui a pris fin le 25 novembre : déjà il faut
savoir que la consommation des ménages est supérieure pendant le mois de
ramadan, les gens engouffrant force plats la nuit en vue de la journée ; le
dernier jour du ramadan on voit des troupeaux de vaches envahir les routes, et
des gens égorger et découper à même le sol leur bovin familial. Ensuite c’est
l’effervescence, les maliens revêtent leurs plus beaux boubous, achètent des
habits neufs pour leurs enfants et font une bonne fête pendant deux jours ! Ce
ramadan sonne comme en écho aux préparatifs de Noël qui constituent en général
l’actualité de cette période en France, mais nous sommes à mille lieux de tout
cela ! Nous pensons fêter Noël au Burkina, et espérons trouver d’autres
personnes pour se joindre à nous… contacts sur place bienvenus ! En attendant
bons préparatifs à tous, et mettez bien vos petites laines !
Guénaël
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